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Pas de crowdfunding pour les martyrs chrétiens d'Algérie - Catholicisme - La Vie

Moines de Tibhirine

© AFP

L'idée était alléchante : récolter 10.000 euros pour financer le processus de béatification des martyrs algériens sur internet. Mais c'était sans compter sur la situation complexe des chrétiens en Algérie. Après avoir obtenu seulement 280 euros la campagne s'est arrêtée.

" L'Église d'Algérie est une Église pauvre financièrement mais riche d'un grand patrimoine spirituel ", avait écrit le moine cistercien Thomas Georgeon sur le site de " crowdfunding " Gofundme. Le Père Georgeon espérait " soutenir la cause de béatification des 7 moines de trappistes de Tibhirine et des 12 autres martyrs assassinés en Algérie dans les années 1994-1996 ". L'objectif était de rassembler 10.000 euros pour " la procédure en cours et la préparation de la célébration de la béatification ".

Car ce moine français n'est pas seulement depuis 2009 le père abbé du monastère de Frattocchie, près de Rome, il est également le postulateur de la béatification des 19 martyrs d'Algérie, dont la cause est actuellement en cours au Vatican. Thomas Georgeon a écrit plusieurs études sur la communauté de Tibhirine, notamment sur frère Luc, le moine-médecin de la communauté.

En lançant en début de semaine ce défi sur ce site spécialisé dans la récolte de fonds pour des actions diverses et variées, on pouvait espérer l'effet des réseaux sociaux ainsi qu'un écho international. Pour cela, le postulateur avait écrit la page en quatre langues. Mais après seulement deux jours et 280 euros récoltés, il a été décidé d'arrêter la campagne, " suite à certaines réactions " - et après " concertation " avec les évêques d'Algérie.

Une campagne accusée de prosélytisme

Pour Mgr Jean-Paul Vesco, l'évêque d'Oran, " cette campagne a déclenché des réactions prévisibles ". Il dit que les quatre évêques catholiques en Algérie apprécient " l'engagement personnel fort du frère Thomas ", mais trouvent " difficilement compréhensible qu'il ait pu engager une telle campagne au nom de l'Église d'Algérie sans l'accord préalable de ses pasteurs ".

Ces " réactions prévisibles " se sont données à voir dans une partie de la presse algérienne ainsi que sur les réseaux sociaux. Ainsi, le quotidien Ennahar titrait en une qu'il s'agissait d'une " Campagne pour financer l'Église d'Algérie pour diffuser le christianisme ". En bref : du prosélytisme.

Selon Jean-Paul Vesco, il existe " des ennemis des chrétiens prêts à instrumentaliser toute chose ", ce qui rend " la question des béatifications complexe ". Dans un entretien avec le quotidien néerlandais Nederlands Dagblad, Jean-Paul Vesco exprimait en 2015 sa crainte de donner l'impression que la mort des moines de Thibirine serait considérée comme " plus importante " que les 200.000 autres personnes qui ont trouvé la mort durant les années noires.

Selon ce dominicain lyonnais, devenu évêque d'Oran en 2013, il s'agissait de la part du moine-postulateur " d'une initiative regrettable qui montre la difficulté à comprendre notre situation depuis l'extérieur ". Et de conclure : " Cela lui permettra peut-être de sentir de l'intérieur le contexte dans lequel vivait les moines. "

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