Tetiana passe une fois de plus en revue son plan de bataille dans sa tête. Tel un général expérimenté dans les tranchées, elle jette un coup d'œil scrutateur par l'interstice à travers lequel un mince rayon de soleil filtre dans le sous-sol sombre et poussiéreux de son école. Après les vacances d'été, ses élèves seront censés y étudier au cas où les missiles russes se remettraient à tomber. La directrice explique sa stratégie : "Nous avons prévu d'installer Internet ici pour que les enfants puissent continuer à suivre leurs cours même quand les sirènes retentissent."
Pendant huit mois entiers, l'école de Zelenodolsk dans l'oblast de Dnipropetrovsk s'est trouvée à seulement 6 kilomètres du front : un îlot isolé au milieu d'un territoire occupé. Quand l'armée ukrainienne est parvenue à libérer la zone alentour, le "point zéro" est repassé sur la rive opposée du fleuve Dnipro. A 70 kilomètres à vol d'oiseau, de l'autre côté du réservoir de Kakhovka, désormais vide, se dresse la centrale nucléaire de Zaporijia, qui continue de faire peser sur la région une menace incommensurable. "Nous aimerions recommencer à enseigner dans les murs, ou au moins de façon mixte, hors ligne et en ligne", précise-t-elle. Environ 500 élèves fréquentent l'établissement, mais l'abri antiaérien ne peut en accueillir que 250. Il