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Ados et réseaux sociaux : "Les parents doivent s'impliquer dans l'éducation numérique de leurs enfants"

L'association Génération Numérique sensibilise les adultes aux risques liés à l'utilisation des réseaux sociaux par les adolescents. Rencontre avec son délégué général à l'occasion de la première exposition d'envergure de Facebook à la Station F.

Snapchat, Instagram, Facebook, YouTube... autant de plateformes sociales sur lesquelles nos enfants sont connectés, très souvent avant même l'âge requis (13 ans dans la plupart des cas). Dans les écoles, les interventions pour former les enfants, les professeurs mais aussi les parents au numérique, se multiplient. Mais qu'en est-il dans les faits ? Comment ces derniers arrivent-ils à gérer les usages de leurs ados sur les réseaux sociaux ?

Dans le cadre d'une exposition organisée par Facebook, l'association Génération Numérique, qui sensibilise les utilisateurs aux risques et enjeux d'Internet, propose un atelier pour mieux appréhender les pratiques des adolescents sur les réseaux sociaux. Pour Cyril Di Palma, délégué général de Génération Numérique, " parler entre adultes ne suffit pas, il est essentiel de donner la parole aux adolescents ".

Pourquoi est-il important d'accompagner les enfants dans leur pratique des réseaux sociaux ?

La question de la parentalité est cruciale dans le cadre de notre action d'éducation auprès des jeunes publics afin que les enfants et les adolescents utilisent de manière réfléchie les outils numériques. Les parents sont parfois mal informés : leurs enfants possèdent potentiellement deux, trois, quatre, cinq comptes et 50 à 300 contacts sur différents réseaux sociaux qu'ils utilisent. Si les parents ne sont pas au courant, en amont, des pratiques de leurs enfants, c'est d'autant plus difficile pour eux de prendre les bonnes décisions et de les accompagner. Le digital est un sujet diffus et en plus, en perpétuelle évolution. Ils sont nombreux à se trouver dans une posture de méconnaissance, ce qui les empêche fondamentalement de remplir leur rôle d'éducateur sur ce sujet. Ils peuvent se sentir dépassés et ne pas saisir le fonctionnement de certains réseaux sociaux comme Snapchat par exemple.

"Les parents font plus confiance aux filles"

Est-ce novateur de proposer un atelier pour former les parents ?

Pas du tout ! Nous organisons 1 500 réunions par an avec des publics adulte depuis 2004-2005, partout en France. Chaque année, nous devons toucher 100 000 à 120 000 parents, via des associations familiales et de parents d'élèves. C'est un nombre toujours insuffisant. En revanche, c'est la première fois que nous bénéficions d'un lieu aussi grand que la Station F.

Pourquoi est-ce important de donner la parole aux adolescents ?

Car ce sont les premiers concernés ! Parler entre adultes ne suffit pas, les témoignages des adolescents sont essentiels.

L'attitude des parents est-elle différente selon que leur enfant est une fille ou un garçon ?

On observe que les parents font plus confiance aux filles. Elles sont nettement moins nombreuses que les garçons à déclarer que les parents contrôlent la durée des connexions. Les garçons sont par conséquent plus surveillés par leurs parents.

"Personne n'est à l'abri de commentaires haineux à son encontre, on peut tous y être confrontés"

Les usages des réseaux sociaux sont-ils différents en fonction du sexe ?

Selon l'âge et le sexe, les enfants n'ont pas les mêmes réseaux, les mêmes pratiques et les mêmes outils. Pour les filles, il s'agit des réseaux les plus visuels tels que Snapchat ou Instagram. Elles ont plutôt tendance à poster des contenus, des photos alors que les garçons qui ont le même âge sont sur des réseaux ou des médias tels que YouTube, Facebook, qui sont plus liés à la communication, à la discussion. Et pour le temps qu'ils y consacrent, il y a des différences de générations entre les 11-14 et les 14-18 ans.

Y a t-il une réduction des cas d'ados ou d'enfants qui sont victimes de cyberharcèlement ?

Ils sont environ 15 %, à avoir rencontré des problèmes. Ce chiffre n'est pas anodin. Cependant, les cas de harcèlement restent un phénomène marginal. À partir du moment où un enfant est connecté, il sera confronté à un moment ou à un autre à des remarques, à des blagues qui peuvent être potaches. Dans la mesure où ces commentaires sont diffusés sur des réseaux sociaux, ils peuvent toucher des milliers, voir des millions de personnes. L'impact n'est pas le même que celui d'une cour d'école. Personne n'est à l'abri de commentaires haineux à son encontre, on peut tous y être confrontés.

Un projet de loi relatif à la protection des données personnelles, initié par la ministre de la justice Nicole Belloubet, et le secrétaire d'Etat chargé du Numérique, Mounir Mahjoubi va, entre autre, obliger les mineurs de moins de 16 ans à fournir une autorisation parentale pour créer un compte Facebook. Qu'en pensez-vous ?

60 % des enfants de moins de 13 ans déclarent détenir au moins un compte sur un réseau social. Cela signifie qu'ils sont déjà 60 % à avoir menti sur leur âge. Laissons au législateur le temps d'étudier les raisons de créations de comptes d'enfants, âgés de moins de 13 ans. À cet âge, il n'y a pas de consentement sur les plateformes. C'est même inscrit dans les conditions générales d'utilisation des réseaux sociaux comme Instagram ou Facebook. Je doute qu'un ado à 15 ans demande l'autorisation à son père et à sa mère d'ouvrir un compte. S'il y en a donc 60 % qui ont menti sur leur âge, je ne vois pas ce pourcentage forcément réduire avec l'âge. Au contraire, j'ai tendance à croire qu'il va augmenter pour que les enfants se sentent plus grands et plus matures. Néanmoins, il faut quand même qu'il y ait une implication des parents dans la vie numérique de leurs enfants. Les questions sur lesquelles nous devons nous pencher sont les suivantes : pourquoi ont-ils tant d'amis ? Que recherchent-ils sur les réseaux ? Qu'est-ce qu'ils y trouvent ? Il faut que les parents sachent mieux prendre en compte les usages de leurs enfants.

Ateliers "Mieux vivre le numérique" à la station F Trois ateliers pilotés par Génération Numérique seront proposés autour de trois thèmes : un premier atelier à 14h portera sur les fake news, sur la manière de s'informer sur internet. Puis à 15h, pour gérer sa e-réputation, sur les informations que l'on mentionne. Et un dernier atelier à 16h se focalisera sur la sécurité et l'informatique, s'adressant spécifiquement aux adultes.

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